Page:Proudhon - Les Confessions d'un révolutionnaire.djvu/176

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tion, en forçant les conservateurs à faire eux-mêmes de la démocratie pour la défense de leurs priviléges, et en rejetant, par ce moyen, la monarchie sur un plan secondaire.

Il faut vaincre le pouvoir, en ne lui demandant rien, prouver le parasitisme du capital, en le suppléant par le crédit ; fonder la liberté des individus, en organisant l’initiative des masses.

Il faut, en un mot, une deutérose de l’idée révolutionnaire, une nouvelle manifestation du socialisme.

À Dieu ne plaise que je veuille grandir mon rôle ! je raconte mes rêves. Je sais combien peu la pensée d’un homme pèse dans les résolutions de la société ; je suis moi-même une preuve vivante de la lenteur avec laquelle l’idée pénètre la masse. Mais, en faisant suivre le récit de mes méditations socialistes de celui de mes actes politiques, je ne fais que continuer la même histoire, l’histoire d’un penseur entraîné malgré lui dans le somnambulisme de sa nation. Et d’ailleurs, passer de la spéculation à l’action, ce n’est point changer de rôle : agir, c’est toujours penser ; dire, c’est faire, dictum factum. Il n’y a pas de différence à mes yeux entre l’auteur qui médite, le législateur qui propose, le journaliste qui écrit, et l’homme d’État qui exécute. C’est pour cela que je demande la permission de parler de ce que j’ai fait, comme si je parlais encore de ce que j’ai écrit : ma conduite et mes idées n’ayant pour objet que la Révolution, ce sera toujours parler de la Révolution.

Puis donc, continuais-je, que l’État, par la nature de son principe, est contre-révolutionnaire ; que la seule initiative légitime est celle du citoyen, et que le droit de proposition appartient à tous, proposons quelque chose, non pas au gouvernement, il le repousserait ; mais à l’Assemblée nationale, mais au pays. Révélons, s’il se peut, à la société, une de ses idées latentes ; montrons-lui, comme en un mi-