plus de 3 ou 4 milliards. L’importance des opérations de pur agiotage est donc à celle des affaires réelles comme 16 ou 18 à 1. Cela est-il moral ?
Ajoutons : Cela est-il économique ?
On a osé dire que les opérations de Bourse n’affectaient pas d’une manière sensible le crédit agricole et industriel ; qu’il n’était pas vrai que les capitaux fussent détournés de leur destination naturelle. Qu’est-ce donc que ces 80 millions que se partagent les agents de change, présidents et appariteurs de cet immense tripot ?
80 millions de courtages supposent que plusieurs centaines de millions ont été journellement engagés au jeu : n’eussent-ils pas été mieux placés dans l’agriculture, à laquelle la Société du Crédit foncier n’a pas un sou à offrir ; dans le commerce, à qui la Banque ne cesse de serrer les courroies ?
Nous voilà donc, par l’effet de la prépotence laissée à l’élément aléatoire sur l’élément juridique, dans un état de démoralisation chronique, organique, légale. Qui donc, voyant ce qui se passe, l’oserait nier ?
L’unique pensée des gens de Bourse se résume en trois mots : gagner, au jeu, de l’argent ! Tous, ou la plupart, ont des revenus, un commerce, une industrie, un état, des moyens d’existence enfin. Que demandent-ils à l’agiotage, alors ? Des profits sans travail, sans capital, sans esprit d’entreprise, sans génie. La Bourse a deux oscillations, la hausse et la baisse, comme la roulette a deux couleurs : vendre en hausse, acheter en baisse, parier sur la rouge ou la noire, c’est tout un. Le hasard est le grand artisan des succès et des revers.
Quand on nous citerait les bénéfices superbes encaissés par les heureux à une partie jouée le plus loyalement du monde, nous demanderions : Quel est cet élément, le hasard ? est-ce une puissance économique, un principe créateur de valeurs utiles et échangeables ?
« La plupart des agents de change, dit le Bulletin de la Presse du 18 janvier 1856, avaient reçu, depuis hier, de la province, un