Page:Proudhon - Manuel du Spéculateur à la Bourse, Garnier, 1857.djvu/59

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industries et l’association des travailleurs ; — pour les affaires de commerce et de change, d’abolir le monopole des offices et tous priviléges d’intermédiaires ; d’opposer aux efforts de l’agiotage la garantie puissante d’établissements spéciaux fonctionnant pour le compte des communes et du pays ; par ce moyen, de créer un vaste système de publicité, de balance et de contrôle qui déjouerait toutes les ruses de la spéculation improductive.

Mais cette heureuse révolution ne semble pas encore mûre ; l’opinion, celle du moins des intérêts qui pourraient parler, ne l’appelle nullement. Quant aux intérêts qui ne parlent pas, outre que leur silence s’interprète dans le sens des premiers, qui ne sait que tout ce que nous pourrions dire en leur faveur serait accusé d’utopie et de tendance révolutionnaire, et comme tel non avenu ?…

Toutefois, s’il n’y a pas lieu d’espérer, quant à présent, que ni le gouvernement prenne l’initiative de cette réforme, ni le pays émette à cet égard un simple vœu, il peut se faire que l’excès du mal amène le remède, et, comme toutes les institutions vieillies, que la spéculation se purge par l’exagération même et la corruption de son idée.

L’institution des Bourses, dans les centres de commerce et d’industrie, imposait à la bourgeoisie française un triple devoir : envers elle-même, envers les classes travailleuses et pauvres, envers l’État.

Envers elle-même, la bourgeoisie avait à surveiller le mouvement des valeurs mobilières et immobilières, en empêcher la dépréciation et en maintenir l’équilibre ; prévenir les fraudes commerciales, les contrefaçons ; démasquer le charlatanisme, assurer la libre concurrence ; combattre le monopole ; conserver, augmenter les fortunes particulières engagées dans les diverses branches de la production ; encourager les entreprises sérieuses, mettre un frein à l’esprit d’aventure, refréner l’usure, organiser le crédit, stigmatiser et flétrir toute spéculation de pur agiotage, toute fortune acquise par des moyens que réprouve la délicatesse et que condamne un système de garanties réciproques et de loyales transactions.