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Page:Proudhon - Manuel du Spéculateur à la Bourse, Garnier, 1857.djvu/61

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bon père de famille l’héritage de ses ancêtres, améliorant le fonds et ne consommant qu’une partie du revenu, dévore tout en viager.

N’est-il pas monstrueux, en effet, de voir cette opération si utile, si morale, quand elle ne s’applique qu’à de médiocres valeurs, à de courtes échéances, l’escompte, devenu général et systématiquement appliqué à des opérations dont l’importance se compte par centaines de millions, et la durée de 50 à 99 ans ? Une ligne de fer est à peine concédée par le gouvernement, que les premiers souscripteurs, portant leurs titres à la Bourse, les vendent avec prime, réalisent : le produit de vingt, trente et quarante années est escompté, encaissé comme si déjà il existait, livré au parasitisme, qui se gorge sans vergogne, à la barbe du prolétaire confondu. Les prodigalités, les dilapidations, les anticipations, qui amenèrent la chute de la monarchie en 89, amèneront tôt ou tard la faillite de la bourgeoisie : déjà la Bourse, aux yeux d’un observateur attentif, en manifeste les symptômes, et la Bourse ne trompe jamais :


Cet oracle est plus sûr que celui de Calchas.


De ces mœurs nouvelles, irrémédiables, qui infectent notre bourgeoisie, sont nés le dégoût du travail, l’incapacité dans les affaires sérieuses, la surexcitation de l’avarice, l’abaissement des consciences, et ces inspirations de la lâcheté qui, depuis 1830, refluant sans cesse des classes moyennes vers les régions supérieures, caractérisent la politique de nos déplorables ministères. Louis-Philippe fut le grand procurateur de cette politique, qui malheureusement n’a pas pris fin avec son règne…… Que la bourgeoisie exalte ce roi et le canonise : elle n’a pas le droit de l’accuser. Mais la France lui doit la dépravation de ses mœurs, l’éclipse de son génie, l’avilissement de son nom, une évolution républicaine sans énergie, sans idée et sans gloire, et peut-être, dans un avenir que nul n’oserait dire éloigné, la perspective d’une révolution sociale.

L’antique haine, qui, sous l’ancienne monarchie, s’attachait