Page:Proudhon - Qu’est-ce que la propriété.djvu/145

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vailleur peut s’approprier la matière qu’il exploite, tout exploiteur en devient, au même titre, propriétaire ;

Que tout capital, soit matériel, soit intellectuel ! étant une œuvre collective, forme par conséquent une propriété collective ;

Que le fort n’a pas droit d’empêcher par ses envahissements le travail du faible, ni l’habile de surprendre la bonne foi du simple ;

Enfin, que nul ne peut être forcé d’acheter ce dont il n’a pas envie, moins encore de payer ce qu’il n’a pas acheté : partant que la valeur échangeable d’un produit n’ayant pour mesure ni l’opinion de l’acheteur ni celle du vendeur, mais la somme de temps et de dépenses qu’il a coûté, la propriété de chacun reste toujours égale.

Ne sont-ce pas là des vérités bien niaises ? Eh bien ! si niaises qu’elles vous semblent, lecteur, vous en verrez d’autres qui les surpasseront encore en platitude et niaiserie. Car nous marchons à rebours des géomètres : pour eux, à mesure qu’ils avancent, les problèmes deviennent de plus en plus difficiles ; nous, au contraire, après avoir commencé par les propositions les plus abstruses, nous finirons par les axiomes.

Mais il faut, pour terminer ce chapitre, que j’expose encore une de ces vérités exorbitantes comme jamais n’en découvrirent ni jurisconsultes ni économistes.


§ 8. Que, dans l’ordre de la justice, le travail détruit la propriété.


Cette proposition est la conséquence des deux précédents paragraphes, que nous allons d’abord résumer.

L’homme isolé ne peut subvenir qu’à une très petite partie de ses besoins ; toute sa puissance est dans la société et dans la combinaison intelligente de l’effort universel. La division et la simultanéité du travail multiplie la quantité et la variété des produits ; la spécialité des fonctions augmente la qualité des choses consommables.

Pas un homme donc qui ne vive du produit de plusieurs