Page:Proudhon - Qu’est-ce que la propriété.djvu/166

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consommable, il y a un dixième du travail qui n’est pas payé : la production coûte plus qu’elle ne vaut.

Transformons actuellement 300 de nos producteurs de blé en industriels de toute espèce : 100 jardiniers et vignerons, 60 cordonniers et tailleurs, 50 menuisiers et forgerons, 80 de professions diverses, et, pour que rien n’y manque, 7 maîtres d’école, 1 maire, 1 juge, 1 curé : chaque métier, en ce qui le concerne, produit pour toute la tribu. Or, la production totale étant 1,000, la consommation pour chaque travailleur est 1, savoir : blé, viande, céréales, 0,700 ; vin et jardinage, 0,100 ; chaussure et habillement, 0,060 ; ferrements et meubles, 0,050 ; produits divers, 0,080 ; instruction, 0,007 ; administration, 0,002 ; messe, 0,001. Total, 1.

Mais la société doit une rente de 10 pour cent : et nous observerons qu’il importe peu que les seuls laboureurs la payent, ou que tous les travailleurs soient solidaires, le résultat est le même. Le fermier augmente le prix de ses denrées en proportion de ce qu’il doit ; les industriels suivent le mouvement de hausse, puis, après quelques oscillations, l’équilibre s’établit et chacun a payé une quantité à peu près égale. Ce serait une grave erreur de croire que dans une nation les seuls fermiers payent les fermages ; c’est toute la nation.

Je dis donc que, vu le prélèvement de 10 pour cent, la consommation de chaque travailleur est réduite de la manière suivante : blé, 0,630 ; vin et jardinage, 0,090 ; habits et chaussures, 0,054 ; meubles et fers, 0,045 ; autres produits, 0,072 ; écolage, 0,0063 ; administration, 0,0018 ; messe, 0,0009. Total, 0,9.

Le travailleur a produit 1, il ne consomme que 0,9 ; il perd donc un dixième sur le prix de son travail ; sa production coûte toujours plus qu’elle ne vaut. D’autre part, le dixième perçu par les propriétaires n’en est pas moins une non-valeur ; car, étant eux-mêmes travailleurs, ils ont de quoi vivre avec les neuf dixièmes de leur produit, comme aux autres, rien ne leur manque. À quoi sert-il que leur ration de pain, vin, viande, habits, logement, etc., soit doublée, s’ils ne peuvent la consommer ni l’échanger ? Le prix