Page:Proudhon - Qu’est-ce que la propriété.djvu/234

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Si Dieu descendait sur la terre et venait habiter parmi nous, nous ne pourrions l’aimer, s’il ne se faisait notre semblable ; ni lui rien donner, s’il ne produisait quelque bien ; ni l’écouter, s’il ne prouvait que nous nous trompons ; ni l’adorer, s’il ne nous manifestait sa puissance. Toutes les lois de notre être, affectives, économiques, intellectuelles, nous prescriraient de le traiter comme nous faisons les autres hommes, c’est-à-dire selon la raison, la justice et l’équité. Je tire de là cette conséquence, que si jamais Dieu se met en communication immédiate avec l’homme, il devra se faire homme.

Or, si les rois sont les images de Dieu et les ministres de ses volontés, ils ne peuvent recevoir de nous l’amour, la richesse, l’obéissance et la gloire, qu’à la condition de travailler comme nous, de se rendre sociables pour nous, de produire en proportion de leur dépense, de raisonner avec leurs serviteurs, et de faire seuls de grandes choses. À plus forte raison si, comme aucuns le prétendent, les rois sont des fonctionnaires publics, l’amour qui leur est dû se mesure sur leur amabilité personnelle ; l’obligation de leur obéir, sur la démonstration de leurs ordres ; leur liste civile, sur la totalité de la production sociale, divisée par le nombre des citoyens.

Ainsi tout s’accorde à nous donner la loi d’égalité : jurisprudence, économie politique, psychologie. Le droit et le devoir, la récompense due au talent et au travail, les élans de l’amour et de l’enthousiasme, tout est réglé d’avance sur un inflexible mètre, tout relève du nombre et de l’équilibre. L’égalité des conditions, voilà le principe des sociétés, la solidarité universelle, voilà la sanction de cette loi.

L’égalité des conditions n’a jamais été réalisée, grâce à

    férence des sexes élève entre eux une séparation de même nature que celle de la différence des races met entre les animaux. Aussi, bien loin d’applaudir à ce qu’on appelle aujourd’hui émancipation de la femme, inclinerais-je bien plutôt, s’il fallait en venir à cette extrémité, à mettre la femme en réclusion.

    Le droit de la femme et ses rapports avec l’homme sont encore à déterminer ; la législation matrimoniale, de même que la législation civile, est à faire.