les uns agriculteurs, les autres manufacturiers, ceux-ci commerçants, ceux-là ingénieurs libres. Or, dans le programme tout ce monde-là est oublié. L’omission est un peu forte ; car enfin le travail industriel dans ses diverses formes, l’agriculture, le commerce, ce n’est dans l’État ni un accessoire, ni un accident : c’est le principal… Si l’Université veut justifier son nom, il faut qu’elle prenne un parti dans ce sens, sinon elle verra se dresser vis-à-vis d’elle une université industrielle… Ce sera autel contre autel, etc… »
Et comme le propre d’une idée lumineuse est d’éclairer toutes les questions qui s’y rattachent, l’enseignement professionnel fournit à M. Chevalier un moyen très-expéditif de trancher, chemin faisant, la querelle du clergé et de l’Université sur la liberté de l’enseignement.
« Il faut convenir qu’on fait la part très-belle au clergé en laissant la latinité servir de base à l’enseignement. Le clergé sait le latin aussi bien que l’Université ; c’est sa langue à lui. Son enseignement d’ailleurs est à bon marché ; donc il est impossible qu’il n’attire pas à lui une grande partie de la jeunesse dans ses petits séminaires et ses institutions de plein exercice… »
La conclusion vient toute seule : changez la matière de l’enseignement, et vous décatholicisez le royaume ; et comme le clergé ne sait que le latin et la Bible, qu’il ne compte dans son sein ni maîtres ès-arts, ni agriculteurs, ni comptables ; que parmi ses quarante mille prêtres, il n’en est peut-être pas vingt en état de lever un plan ou de forger un clou, on verra bientôt à qui les pères de famille donneront la préférence, de l’industrie ou du bréviaire, et s’ils n’estiment pas que le travail est la plus belle des langues pour prier Dieu.
Ainsi finirait cette opposition ridicule d’éducation religieuse et de science profane, de spirituel et de temporel, de raison et de foi, d’autel et de trône, vieilles rubriques désormais vides de sens, mais dont on amuse encore la bonhomie du public, en attendant qu’il se fâche.
M. Chevalier n’insiste pas, du reste, sur cette solution : il sait que religion et monarchie sont deux partenaires qui, bien que toujours en brouille, ne peuvent exister l’une sans