Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 1, Garnier, 1850.djvu/139

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour la solution du problème qui nous occupe ; il faut savoir, dis-je, non s’il est désirable que tous la reçoivent, chose que personne ne met en doute, mais si elle est possible.

Pour bien saisir toute la portée des vues de M. Chevalier, il est indispensable de connaître sa tactique.

M. Chevalier, façonné de longue main à la discipline, d’abord par ses études polytechniques, plus tard par ses relations saint-simoniennes, et finalement par sa position universitaire, ne paraît point admettre qu’un élève puisse avoir d’autre volonté que celle du règlement, un sectaire d’autre pensée que celle du chef, un fonctionnaire public d’autre opinion que celle du pouvoir. Ce peut être une manière de concevoir l’ordre aussi respectable qu’aucun autre, et je n’entends exprimer à ce sujet ni approbation ni blâme. M. Chevalier a-t-il à émettre un jugement qui lui soit personnel ? En vertu du principe que tout ce qui n’est pas défendu par la loi est permis, il se hâte de prendre le devant et de dire son avis, quitte à se rallier ensuite, s’il y a lieu, à l’opinion de l’autorité. C’est ainsi que M. Chevalier, avant de se fixer au giron constitutionnel, s’était donné à M. Enfantin ; c’est ainsi qu’il s’était expliqué sur les canaux, les chemins de fer, la finance, la propriété, longtemps avant que le ministère eût adopté aucun système sur la construction des railways, sur la conversion des rentes, les brevets d’invention, la propriété littéraire, etc.

M. Chevalier n’est donc pas, tant s’en faut, admirateur aveugle de l’enseignement universitaire ; et jusqu’à nouvel ordre, il ne se gêne pas pour dire ce qu’il en pense. Ses opinions sont des plus radicales.

M. Villemain avait dit dans son rapport : « Le but de l’instruction secondaire est de préparer de loin un choix d’hommes pour toutes les positions à occuper et à desservir dans l’administration, la magistrature, le barreau et les diverses professions libérales, y compris les grades supérieurs et les spécialités savantes de la marine et de l’armée. »

« L’instruction secondaire, observe là-dessus M. Chevalier[1], est appelée aussi à préparer des hommes qui seront

  1. Journal des Économistes, avril 1843.