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Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 1, Garnier, 1850.djvu/382

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disputes qu’elle suscita et qui déroutèrent la Réforme, vous apparaîtra brillante de clarté et d’harmonie.

Et maintenant l’homme est-il Dieu ?

Dieu, d’après l’hypothèse théologique, étant l’être souverain, absolu, hautement synthétique, le moi infiniment sage et libre, par conséquent indéfectible et saint ; il est sensible que l’homme, syncrétisme de la création, point d’union de toutes les virtualités physiques, organiques, intellectuelles et morales manifestées par la création ; l’homme perfectible et faillible, ne satisfait point aux conditions de Divinité qu’il est de la nature de son esprit de concevoir. Ni il n’est Dieu, ni il ne saurait, vivant, devenir Dieu.

À plus forte raison le chêne, le lion, le soleil, l’univers lui-même, scissions de l’absolu, ne sont Dieu. Du même coup, l’anthropolâtrie et la physiolâtrie sont renversées.

Il s’agit à présent de faire la contre-épreuve de cette théorie.

Du point de vue des contradictions sociales, nous avons apprécié la moralité de l’homme. Nous allons apprécier à son tour, et du même point de vue, la moralité de la Providence. En d’autres termes, Dieu, tel que la spéculation et la foi le livrent à l’adoration des mortels, est-il possible ?


§ II. — Exposition du mythe de la Providence. — Rétrogradation de Dieu.


Les théologiens et les philosophes, parmi les preuves, au nombre de trois, qu’ils ont coutume d’apporter de l’existence de Dieu, mettent en première ligne le consentement universel.

J’ai tenu compte de cet argument lorsque, sans le rejeter ni l’admettre, je me suis tout aussitôt demandé : Qu’affirme le consentement universel en affirmant un Dieu ? Et, à ce propos, je dois rappeler que la différence des religions n’est point un témoignage de l’erreur dans laquelle le genre humain serait tombé en affirmant hors de lui un Moi suprême, pas plus que la diversité des langues n’est un témoignage de la non-réalité de la raison. L’hypothèse de Dieu, loin de s’affaiblir, se fortifie et s’affaiblit par la divergence même et l’opposition des cultes.