Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 2, Garnier, 1850.djvu/105

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et venue de gens qui cherchent de l’occupation, ou qui demandent du pain. Pour remplir cet humble programme, le profane vulgaire a dépensé plus de génie que tous les philosophes, les savants et les poëtes, n’en ont mis à composer leurs chefs-d’œuvre.

Chose singulière, dont nous n’avons pas encore cité d’exemple, et qui surprendra le lecteur peu accoutumé à ces métamorphoses de la pensée, le crédit, dans son expression la plus avancée, se présente sous une formule déjà synthétique : ce qui ne l’empêche pas d’être encore une antinomie, la septième dans l’ordre des évolutions économiques. Ainsi que l’a démontré M. Cieszkowski dans un ouvrage dont je ne puis trop recommander la lecture aux amateurs de métaphysique appliquée, le crédit atteint son plus haut période en se développant successivement en position, opposition et composition, par conséquent en produisant une idée positive et complète. Mais, comme nous le démontrerons à notre tour, cette synthèse régulièrement formée n’est pour ainsi dire que d’un ordre secondaire ; c’est encore une contradiction. Ainsi, les idées comme les corps se composent et se décomposent à l’infini, sans que la science puisse dire jamais quel est le corps ou l’idée simple. Les idées et les corps sont tous d’une simplicité égale, et ne nous semblent complexes que par suite de leur comparaison ou mise en rapport avec d’autres corps et d’autres idées.

Tel est le crédit ; une idée qui, de simple qu’elle paraît à sa naissance, se dédouble en posant sa contraire, puis qui se complique en se combinant avec elle, et qui, après cette union, reparaît aussi simple, aussi élémentaire, aussi contradictoire et impuissante, qu’au moment de sa génération première. Il est temps d’arriver aux preuves.

Le crédit se développe en trois séries d’institutions : les deux premières, inverses l’une de l’autre ; et la troisième les résumant toutes deux dans une intime combinaison. La première série comprend la lettre de change, la banque de dépôt, à laquelle il faut rapporter la caisse d’épargnes ; enfin le prêt sur gage ou sur hypothèque, dont le mont-de-piété fournit un exemple.

Par cette suite d’opérations, on a voulu rendre l’argent plus accessible à tout le monde, d’abord en lui facilitant le chemin, et en abrégeant les distances ; puis, en rendant l’argent lui-même moins casanier, moins craintif de se