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Page:Proudhon - Théorie de l impôt, Dentu, 1861.djvu/314

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les mieux démontrées de l’économie politique, qu’au point de vue de la collectivité sociale la rente est un mot qui ne représente aucune réalité positive. Il n’y a pas plus de rente foncière que de rente industrielle ou mobilière : ces expressions n’indiquent que des rapports de particulier à particulier, de propriétaire à fermier, de prêteur à emprunteur, etc., mais rapports qui, au regard de la société, s’évanouissent. Devant la nation, le produit brut et le produit net sont identiques.

Ainsi, une nation ne cultive pas plus de terre qu’il ne lui en faut pour se nourrir ; il est même des pays où la terre manque à la population, témoin la Belgique, obligée d’acheter chaque année à l’étranger pour 15 millions de francs de céréales. De ce côté donc il n’y a pas de rente, il ne peut pas y en avoir. L’idée de rente appliquée à une nation, à l’humanité tout entière, implique contradiction.

Sans doute, le laboureur récolte plus qu’il ne lui faut pour subsister ; mais il récolte pour l’industrieux, qui de son côté travaille pour le cultivateur : compensation faite, la terre n’a produit que ce dont la communauté avait besoin ; il n’y a pas de reste, il n’y a point de rente. La preuve qu’il ne peut pas y en avoir, c’est que, s’il se trouvait après la récolte un excédant, cet excédant formerait une non-valeur : dès la troisième ou la quatrième année, on cultiverait moins, l’excédant ne se reproduirait plus.

La rente est donc chose essentiellement relative et personnelle : c’est cette part du produit qui excède la dépense du cultivateur, et qui, en se généralisant,