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Page:Proudhon - Théorie de l impôt, Dentu, 1861.djvu/57

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pour compte des citoyens, ne se distingue pas lui-même de la collectivité des citoyens, en sorte que si, par cas fortuit, il réalisait sur ses dépenses un bénéfice, ce bénéfice ne serait pas pour lui, ce serait pour les citoyens, dont les représentants ne manqueraient pas de faire de ce bénéfice le premier article du budget des recettes de l’année suivante.

Certes, les dépositaires du pouvoir dans les États monarchiques autrefois régis par le droit divin ne pouvaient admettre une semblable distinction. Selon eux, le principe des services publics, surtout quand il s’agit des services industriels, tels que banques, assurances, viabilité, entrepôts, était au contraire que l’État devait viser au plus gros revenu net possible. C’est ainsi que, par un reste de ce vieil esprit féodal, la loi française en a usé pour les chemins de fer, au moyen desquels on a recréé une aristocratie de rentiers formidable. Alors la prospérité du pays est censée se mesurer, non au bon marché des services, mais à la quotité des dividendes. Quand les actions de chemins de fer montent, on dit que la richesse publique augmente : c’est pourtant juste le contraire qui est la vérité. Et c’est encore d’après la même théorie que les partisans de l’État supérieur et antérieur à la société supputent que plus un pays paye d’impôts, plus il est riche. Le pays, pour ces économistes fiscaux, ce ne sont pas les contribuables, ce sont les bénéficiaires des contributions.

La Suisse, moins qu’aucun autre pays, paraît exposée au retour de ces avanies féodales. Mais la vérité