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Page:Proudhon - Théorie de l impôt, Dentu, 1861.djvu/68

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Louis XIV. Il croit qu’un souverain fait aller les affaires en dépensant beaucoup. Qu’importe, se dit-il, la grosseur du budget ? L’argent dépensé n’est pas perdu : il circule, après avoir servi à payer le rentier, le fonctionnaire, le soldat, et les entrepreneurs chargés des travaux ; puis il revient à l’État par la voie de l’impôt, et les choses n’en vont que mieux.

Les économistes, c’est une justice à leur rendre, ont souvent réfuté ce sophisme : mais ce qu’il y a de fâcheux, c’est que leurs arguments, ou ne parviennent point aux masses, ou ne sont pas compris d’elles. Il ne manque même pas de gens d’affaires des plus habiles à qui il est impossible de faire sur ce point entendre raison. Voici, ce me semble, comment il conviendrait de leur présenter la chose.

Sans doute, le numéraire versé à l’État, et dépensé par lui, ne périt point : du trésor, il passe dans la main des employés, des fournisseurs, des rentiers, de tous ceux dont l’État emprunte les capitaux et les services ; de là il redescend dans la nation, par les achats de subsistances, vêtements, etc., etc., dont les salariés et les rentiers de l’État ont besoin pour leur consommation. Puis, après s’être éparpillé, ce numéraire se rassemble de nouveau, et revient l’année suivante dans les caisses du fisc, après avoir donné lieu à un immense mouvement commercial. En cela Louis XIV et les partisans de gros budgets ont raison, et vous, bonnes gens, vous ne vous trompez pas non plus.

Mais remarquez ceci : je prends un article du budget, l’armée. L’armée, en France, est de cinq à six cent