Page:Proudhon - Théorie de l impôt, Dentu, 1861.djvu/77

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gouvernement la même clarté et la même fixité de principe que la société à laquelle elle succède.

Maintenant ce régime d’autocratie et de privilége a cessé : nous savons pourquoi, et personne ne le regrette. Mais il s’en faut de beaucoup que sur les ruines de l’absolutisme la Révolution ait rétabli l’ordre, je parle de l’ordre théorique, spéculatif, bien entendu, de cet ordre qui consiste avant tout dans la liaison des principes aux conséquences. À cet égard, il est permis de dire, sans calomnier notre époque, que nous sommes dans une anarchie épouvantable.

Ainsi, pour revenir à notre thèse, demandons-nous qui a le droit d’imposer des impôts ; comme on avait répondu jadis : C’est le roi, on répond aujourd’hui avec le marquis de Mirabeau : C’est la nation. Voilà qui est bien. Expliquez-nous seulement comment, le principe ayant été changé, la pratique est restée absolument et identiquement la même ; comment la nation soi-disant consentante fait sur elle-même ce que faisait l’absolutisme. Les gouvernements les plus constitutionnels, les plus parlementaires, créent des impôts haut la main, en inventent de nouveaux, empruntent par-dessus le marché, dépensent, accumulent les dettes, creusent le déficit, que c’est merveille. Paul-Louis Courier n’en revenait pas. Il dénonçait aux souverains absolus de l’Europe la machine représentative comme la plus sûre, la plus expéditive, pour soutirer la richesse d’une nation sans la faire crier. N’avait-elle pas consenti ? « Essayez-en, princes, disait-il, et vous ne voudrez plus autre chose. » —