Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/167

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encore le puritanisme démocratique ne s’est-il pas montré satisfait : quelques-uns voulaient qu’on donnât le droit de voter aux enfants et aux femmes ; d’autres protestèrent contre l’exclusion des faillis, des forçats libérés et des détenus ; peu s’en fallut qu’on ne demandât, l’adjonction des chevaux et des ânes.

La théorie de la propriété, telle que nous la produisons en ce moment, dissipe tous ces nuages. D’après cette théorie, la propriété n’est point donnée comme signe ou garantie de capacité politique : la capacité politique est une faculté de l’intelligence et de la conscience indépendante de la qualité de propriétaire ; sur ce point on peut dire que tout le monde est d’accord. Mais nous ajoutons que si l’opposition au despotisme est un acte de la conscience, qui n’a pas besoin pour se produire que le citoyen paie deux cents ou cinq cents francs de contributions, et jouisse de trois mille francs ou plus de revenu, cette même opposition, considérée comme manifestation de la collectivité, n’a de puissance vis-à-vis du pouvoir, et ne devient efficace que si elle est l’expression d’une masse de propriétaires. Ceci est affaire de mécanique, et n’a rien de commun avec la capacité et le civisme des citoyens. Une comparaison achèvera de me faire comprendre. Tout individu mâle, âgé de vingt ans et valide, est apte au service militaire. Mais il faut encore, avant de l’envoyer a l’ennemi, l’exercer, le discipliner, l’armer ; sans quoi, il ne servirait absolument de rien. Une armée de conscrits sans armes serait d’aussi nul effet à la guerre qu’une charretée de registres