Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/178

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de toute mesure : si absolu que le fasse la loi, il s’apercevra bientôt, à ses dépens, que la propriété ne saurait vivre d’abus ; qu’elle aussi doit s’incliner devint le sens commun et devint la morale ; il comprendra que si l’absolu aspire à sortir de son existence métaphysique et à devenir positivement quelque chose, ce ne peut être que par la raison et la justice. Dès que l’absolu tend à se réaliser, il devient justiciable de la science et du droit. Seulement, comme il est essentiel au progrès de la justice que la conformité de la propriété à la vérité et à la morale soit volontaire, qu’à cette fin le propriétaire doit être maître de ses mouvements, aucune obligation ne lui sera imposée par l’État. Et ceci rentre tout à fait dans nos principes : le but de la civilisation, avons-nous dit, l’œuvre de l’État étant que tout individu exerce le droit de justice, devienne organe du droit et ministre de la loi ; ce qui aboutit à la suppression des constitutions écrites et des codes. Le moins de lois, je veux dire de prescriptions réglementaires et de statuts officiels, possible, tel est le principe qui régit la propriété, principe d’une moralité évidemment supérieure et par lequel seul l’homme libre se distingue de l’esclave.

Dans le système inauguré par la révolution de 89, et consacré par le Code français, le citoyen est plus qu’un homme libre : c’est une fraction du souverain. Ce n’est pas seulement dans les comices électoraux que s’exerce sa souveraineté, ni dans les assemblées de ses représentants ; c’est aussi, c’est surtout dans l’exercice de son industrie, la direction de son esprit, l’administration