Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/206

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tandis que ses entreprises augmentent ; son insuffisance par conséquent croissant dans une progression beaucoup plus rapide que sa propriété, l’inégalité des fortunes diminuera encore ; elle tendra à se rapprocher des nombres 101, 102, 103, 104, 105, c’est-à-dire qu’elle deviendra insignifiante. En quoi, dans tout cela, la propriété est-elle violée, la liberté individuelle atteinte ? Et qu’avons-nous besoin de réglementation ? La propriété, précisément parce que nous l’avons faite absolue, se montre égalitaire : chose à laquelle nous ne nous fussions pas attendus, mais irrécusable.

Voilà pour la pratique, je veux dire pour l’économie générale. Pour ce qui est de la définition, ou, en autres termes, des rapports de la propriété avec l’État, la contradiction qui nous a tant embarrassé n’est pas moins bien résolue.

Le droit romain. dit : « Dominium est jus utendi et abutendi re suâ, quatenùs juris ratio patitur ; la propriété est le droit d’user et d’abuser de sa chose, autant que la raison du droit le souffre. » La définition du code Napoléon, article 544, revient à celle-là : « La propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois et par les règlements. » Le latin, je le répète, est plus énergique, plus profond que le français ; mais il est moins clair. On pourrait croire que la réserve « quatenùs juris ratio patitur, autant que la raison du doit le souffre, » n’a trait qu’au for intérieur ; que le préteur a voulu déclarer