Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/45

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Le manufacturier a-t-il besoin, pour être industriellement et commercialement libre, d’être propriétaire de la maison ou de l’appartement qu’il habite avec sa famille, de l’atelier dans lequel il travaille, du magasin où il conserve ses matières premières, de la boutique où il expose ses produits, du terrain sur lequel maison d’habitation, atelier, magasin et boutique ont été construits ? Eu aucune façon. Pourvu qu’il obtienne un bail assez long pour lui laisser le temps de retrouver l’amortissement intégral des capitaux qu’il a dépensés dans sa location, et qu’en raison de la nature des choses il ne peut emporter avec lui à la fin de son bail, le manufacturier jouit, quoique locataire, d’une liberté suffisante.

Le cultivateur qui exploite une terre à titre de fermier jouit-il d’une égale liberté ? Évidemment non, puisqu’il ne peut, sans l’autorisation expresse du propriétaire, transformer un vignoble en forêt, en prairie, en terre a blé, en fruitier, en potager, ou réciproquement. Si la différence des terres était telle que de semblables transformations fussent toujours absurdes, la liberté industrielle du fermier serait suffisante : l’appropriation personnelle des terres arables, des prairies, des forêts, des vignobles, des fruitiers et des potagers n’attrait pas plus de raison d’être que celle des rivières et des canaux, des ponts et des routes, des mines et des chemins de fer.

Ainsi, quand on fait abstraction de la rente, ou, plus exactement, de ceux qui en profitent, la propriété foncière se justifie par la nécessité de laisser au cultivateur