Page:Proust - Contre Sainte-Beuve, 1954.djvu/147

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avec le régime impérial le lui interdisaient, et se contenta de rédiger anonymement un plan de défense dont l’avocat était autorisé à se servir, mais sans nommer Sainte-Beuve, et où il disait que Béranger avait été aussi hardi que Baudelaire, en ajoutant  : « Loin de moi de diminuer rien à la gloire d’un illustre poète (ce n’est pas Baudelaire, c’est Béranger), d’un poète national, cher à tous, que l’empereur a jugé digne de publiques funérailles, etc.  »

Mais il avait adressé à Baudelaire une lettre sur Les Fleurs du Mal qui a été reproduite dans les Causeries du Lundi, en faisant valoir, pour diminuer sans doute la portée de l’éloge, que cette lettre avait été écrite dans la pensée de venir en aide à la défense. Il commence par remercier Baudelaire de sa dédicace, ne peut pas se décider à dire un mot d’éloge, dit que ces pièces, qu’il avait déjà lues, font, réunies, «  un tout autre effet  », qu’évidemment c’est triste, affligeant, mais que Baudelaire le sait bien, cela dure ainsi pendant une page, sans qu’un seul adjectif laisse supposer si Sainte-Beuve trouve le livre bien. Il nous apprend seulement que Baudelaire aime beaucoup Sainte-Beuve et que Sainte-Beuve sait les qualités de cœur de Baudelaire. Enfin, vers le milieu de la seconde page, il se lance, enfin une appréciation