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XII

LE BALZAC DE M. DE GUERMANTES


Balzac naturellement, comme les autres romanciers, et plus qu’eux, a eu un public de lecteurs qui ne cherchaient pas dans ses romans une œuvre littéraire, mais de simple intérêt d’imagination et d’observation. Pour ceux-là, les défauts de son style ne les arrêtaient pas, mais plutôt ses qualités et sa recherche. Dans la petite bibliothèque du second, où, le dimanche, M. de Guermantes court se réfugier au premier coup de timbre des visiteurs de sa femme, et où on lui apporte son sirop et ses biscuits à l’heure du goûter, il a tout Balzac, dans une reliure en veau doré avec une étiquette de cuir vert, de chez M. Béchet ou Werdet, ces éditeurs à qui il écrit pour leur annoncer l’effort surhumain qu’il va faire de leur envoyer cinq feuillets au lieu de trois d’une œuvre appelée au plus grand retentissement, et à qui il réclame en échange un supplément de prix. Souvent, quand je venais voir Mme de Guermantes, quand elle sentait que les