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VIII

LA MÉTHODE DE SAINTE-BEUVE

Je suis arrivé à un moment, ou, si l’on veut, je me trouve dans de telles circonstances, où l’on peut craindre que les choses qu’on désirait le plus dire – ou à défaut du moins de celles-là, si l’affaiblissement de la sensibilité, qui est la banqueroute du talent, ne le permettait plus, celles qui venaient ensuite, qu’on était porté par comparaison avec ce plus haut et plus sacré idéal à ne pas estimer beaucoup, mais enfin qu’on n’a lues nulle part, qu’on peut penser qui ne seront pas dites si on ne les dit pas, et qu’on s’aperçoit qui tiennent tout de même à une partie même moins profonde de notre esprit, – on ne puisse plus tout d’un coup les dire. On ne se considère plus que comme le dépositaire, qui peut disparaître d’un moment à l’autre, de secrets intellectuels, qui disparaîtront avec lui. Et on voudrait faire échec à la force d’inertie de la paresse antérieure, en obéissant à un beau commandement du Christ dans saint Jean  : « Tra-