déjeuner, il était bien rare qu’il ne fallût pas donner déjà son avis ou fournir des explications sur quelque événement d’importance :
— Françoise, imaginez-vous que Mme Goupil est passée plus d’un quart d’heure en retard pour aller chercher sa sœur ; pour peu qu’elle s’attarde sur son chemin cela ne me surprendrait point qu’elle arrive après l’élévation.
— Hé ! il n’y aurait rien d’étonnant, répondait Françoise.
— Françoise, vous seriez venue cinq minutes plus tôt, vous auriez vu passer Mme Imbert qui tenait des asperges deux fois grosses comme celles de la mère Callot ; tâchez donc de savoir par sa bonne où elle les a eues. Vous qui, cette année, nous mettez des asperges à toutes les sauces, vous auriez pu en prendre de pareilles pour nos voyageurs.
— Il n’y aurait rien d’étonnant qu’elles viennent de chez M. le Curé, disait Françoise.
— Ah ! je vous crois bien, ma pauvre Françoise, répondait ma tante en haussant les épaules. Chez M. le Curé ! Vous savez bien qu’il ne fait pousser que de petites méchantes asperges de rien. Je vous dis que celles-là étaient grosses comme le bras. Pas comme le vôtre, bien sûr, mais comme mon pauvre bras qui a encore tant maigri cette année.
— Françoise, vous n’avez pas entendu ce carillon qui m’a cassé la tête ?
— Non, madame Octave.
— Ah ! ma pauvre fille, il faut que vous l’ayez solide votre tête, vous pouvez remercier le Bon Dieu. C’était la Maguelone qui était venue chercher le docteur Piperaud. Il est ressorti tout de suite avec elle et ils ont tourné par la rue de l’Oiseau. Il faut qu’il y ait quelque enfant de malade.
— Eh ! là, mon Dieu, soupirait Françoise, qui ne pouvait pas entendre parler d’un malheur arrivé