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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/197

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plus que de la fatigue et une fièvre lourde.

— Le monde me paraît si simple, disait Claire, le bonheur si facile ! Et depuis que vous êtes là, Maurice, je ne sais plus… Je ne comprends plus…

Le jeune homme baissa les yeux. Il eut un vertige. Pourquoi fuyait-il le bonheur qui s’offrait ? Qu’avait-il fait de sa vie ? Mais il se redressa. « Allons, j’ai le délire, se dit-il, demain tout cela sera bien loin. » Il tendit la main à la jeune fille et l’aida à se lever. Il était tard ; ils se hâtèrent vers la ville.

Un vent nocturne se mit à souffler, et il semblait que cette caresse aérienne allégeât la pesante angoisse où deux jeunes cœurs amoureux avaient failli sombrer… Mais voici que la rue de la petite ville apparaît. Les lumières des maisons y piquent de petites étoiles vacillantes. Entre les deux rangées de demeures bien closes, souvent coupées par les murs d’un jardin, on se trouve déjà à l’abri, loin de l’eau noire, des prairies vagues baignées d’humidité. Quels fantômes ne disperseraient pas les demeures des hommes ? Maurice, au milieu d’elles, se reprenait et redescendait en lui-même :