Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/32

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Ainsi, c’est une sorte de drame minuscule qui se jouait dans cette auberge de la Brie, pendant que deux chasseurs se délassaient en buvant du vin d’Avallon, neuf et léger.

Dans son trouble, voici, si l’on veut, ce que pensait le jeune homme et ce qu’il n’osait exprimer :

— L’armée est une bien belle chose, et c’est trop, je le sens bien, que d’en médire, comme fait mon père. Cependant, pourquoi ces conquêtes, ces abus de la force inique, dont je vois bien que le capitaine Nangès a goûté l’ivresse malsaine ? Je ne veux pas me laisser toucher par ces actions glorieuses qui me donnent assurément une grande idée de leur auteur, mais qui sentent un peu le moyen âge. Peut-être l’armée atteindrait-elle à une beauté plus sobre et plus moderne, si elle voulait se faire la modeste éducatrice de la nation et renoncer aux jeux coûteux et peu honorables de la guerre. Car si…

C’était un compromis. Mais le débat n’était-il pas passionnant qui mettait aux prises tant de forces contraires et égales, dont l’accord insensé constituait précisément la maladie de notre siècle ? Au vrai, Maurice Vincent ne