Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/37

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religion avant même que l’on crût, et il écrit la phrase célèbre : « Naturellement même cela vous fera croire et vous abêtira. — Mais c’est ce que je crains. — Et pourquoi ? Qu’avez-vous à perdre ? » Pour ma part, je ne redoute pas de telles extrémités.

Peut-être ce coup-là, M. Nangès allait-il un peu loin. Mais il se trouva justement qu’il disait ce qu’il fallait dire. C’était une utile réponse aux tièdes leçons de M. Vincent.

Tiraillé entre ces deux partis, Maurice devait écouter son cœur. Il avait la conscience du danger. Suivre l’instituteur, c’était tout perdre, et la vraie conscience de lui-même, et l’utilisation de ses facultés normales. Ses vertus naturelles ne trouvaient plus leur emploi.

Nangès se flatte d’avoir porté un coup qui peut perdre ou sauver le jeune homme. Ou Maurice se retrouvera, et retrouvera du même coup sa vraie route, — ou, au contraire, il sera effrayé des forces du passé, et, comme tant d’autres, acceptera l’hypocrisie, consentira au double jeu qui le révoltait tout à l’heure. Or justement, lorsqu’il s’était aperçu qu’il se plaisait aux récits passionnés du capitaine Nangès, n’avait-il pas déjà rejeté cette hypo-