Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/60

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chose dans l’exercice de cette noble profession. Il avait le sentiment vif que l’intellectualisme était déchu, et il se demandait si les imprimeurs ne deviendraient pas bientôt les derniers tenants de la culture française, comme les Alde et les Estienne en avaient été les premiers.

Telles étaient les pensées de Maurice Vincent quand il vint à entendre les discours du capitaine Nangès. Ils firent sur lui une extraordinaire impression. Nangès n’avait pas parlé de ses actions pour en tirer quelques effets de pittoresque. Aucune image d’exotisme douteux n’était venue gâter le mysticisme abstrait de ses propos. Le capitaine n’en acquérait aux yeux du jeune homme que plus de grandeur. Ces conversations de chasse avaient fait entrer le jeune impatient dans un monde nouveau. Au reste, il ne raisonnait pas, et qui raisonne dans la vie, outre les philosophes et les moralistes ; Ne sont-ce point des mouvements imperceptibles, des sensations troubles, d’obscurs frissons, qui font et défont nos jours, et nouent nos actions et les dénouent ?

Ce n’étaient pas des théories que Maurice avait retenues des paroles de Nangès. Mais une certaine impression s’était établie en lui