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PHYLLIS

vous ayez jamais été mariée ; c’est bien le parti le plus sage. Eh bien ! chère Phyllis, qu’êtes-vous devenue ? — il prit un « siège sans façon. — Sauf vos yeux vous êtes méconnaissable ; si pâlie, si maigrie, si changée.

« La réclusion où vous vous cloîtrez est en train de vous tuer.

— J’aime mon petit coin tranquille. Et puis, je vous dirai que tout me fatigue et m’ennuie. Est-ce pour me faire ces jolis compliments que vous avez forcé ma porte, sir Francis ?

— Je n’ai pas à vous faire de compliments, me dit-il avec une franchise brutale. Au fond, vous savez ce que je pense de vous. Son regard avait une expression si hardie à cet instant que le détournai la tête et regrettai que ma mère ne fût pas avec moi.

— Qu’êtes-vous venu faire dans le pays ? dis-je pour détourner de moi la conversation Je vous croyais parti en Écosse.

— Certaines nouvelles que j’ai apprises chez mes amis Leslie m’en ont fait revenir, dit-il avec intention. Du reste, je me doutai. ; bien, ajouta sir Francis d’une voix plus basse, qu’un jour, tout cela finirait mal… pour Carrington.

« Oh ! pardon ! j’oublie que vous m’avez défendu de prononcer son nom. Disons : lui.

— Ainsi, vous ne plaignez que lui dans cette affaire ? Je le regardais en face, indignée.

Mais il ne se troubla point et reprit avec un sourire bizarre :

— Je le plains d’avoir perdu la femme que vous êtes pour retomber entre les mains de celle… Il hésita.

— De celle qui veut me le reprendre, n’est-ce pas ? Puis, avec un de ces mouvements impétueux qui me font souvent parler malgré moi :

— Vous l’avez vu, il vous a parlé ? Dites, dites ce que vous savez ?

Sir Garlyle eut encore une hésitation, pourtant, dans ses yeux qui ne me quittaient point, je voyais une lueur inquiétante. Qu’était-il venu me dire ? Pourquoi était-il ici ? Il fallait tirer cela au clair, et avec un homme aussi habile, ce n’était pas une tache aisée.

Il affectait un air embarrassé.

— Mon Dieu, mistress Car… Madame, si je vous disais l’impression que m’a laissée ma visite à Strangemore, je craindrais que vous… n’étant pas encore assez forte — que vous n’ayez une émotion.

— Oh ! interrompis-je vivement, après celles par lesquelles j’ai passé, je puis tout entendre ! Et que me direz-vous de plus que ce que je sais ? M. Car-