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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/27

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PHYLLIS

eu qu’à passer l’ancienne vieille robe de Dora, un peu longue pour ma taille, et à brosser mes cheveux rebelles pour essayer de me rendre présentable.

M. Carrington, en nous voyant paraître toutes deux, s’épanouit ; il installa soigneusement Dora sur le siège et grimpa à côté d’elle.

Billy et moi nous perchâmes côte à côte, Roland derrière nous, avec l’intention de changer à l’arrivée de Jenny Hastings que nous devions prendre un peu plus loin.

Le fouet claqua, les chevaux secouèrent gourmettes et grelots. Nous partons ! Du plus loin que je pus la voir j’envoyai mille baisers à maman qui était restée sur le seuil, et des gestes à Martha et à Ketty, bouche bée sur la porte de la cuisine et dévorant des yeux notre superbe équipage.

Pour elles, cela ne fait pas un doute que Dora sera la maîtresse de toutes ces richesses avant trois mois d’ici.

À Rysland, nous enlevâmes misses Anna et Jenny Hastings accompagnées de leur frère, gros garçon infatué de lui-même, mais assez bien élevé, qui vint s’asseoir sur mon banc et s’essaya à des plaisanteries sans beaucoup de sel.

Peu m’importait.

J’avais un superflu de gaîté que je pouvais aussi bien déverser sur lui que sur tout autre. Aussi je me mis à rire, à babiller et à caqueter comme une pie un peu grise… grise d’air et de joie !

Après le déjeuner, animé de la gaîté la plus vive : petits jeux, promenade dans les bois où chacun se groupa suivant sa fantaisie.

M. Carrington ne quittait guère le sillage de la robe bleue portée par ma charmante sœur qui n’avait jamais été si jolie. Plusieurs fois, je surpris ses yeux graves fixés sur moi, tandis que je flirtais avec Henry Hastings, m’amusant follement de ses grâces un peu lourdes.

Inutile de dire que Roland, parfaitement oublieux de la fille du colonel, s’était fait le chevalier servant de miss Jenny, et lui tenait les propos les plus galants.

Un jour comme celui-ci devrait avoir plus de vingt-quatre heures ; mais, à la fin, le soir tombe et voici venue l’heure du départ.

Je marchais en avant avec mon adorateur qui succombait sous le poids des châles et couvertures dont nous l’avions chargé. M. Carrington hâta le pas pour nous rejoindre et me dit d’un air un peu embarrassé :

— Miss Phyllis, il me semble vous avoir entendu dire que vous n’étiez jamais montée sur le siège d’un coach. Voulez-vous y monter au retour ?