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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/66

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PHYLLIS

Décidément, j’ai remis ce matin à Anna, ma femme de chambre, ma robe de soie bleu-vert avec l’ordre de la recouvrir au plus vite d’un voilage de tulle, pailleté que j’ai rapporté de Paris… Et Dora aura une jolie toilette de soirée que personne ne reconnaîtra.

Mon beau-frère et ma belle-sœur n’arrivèrent qu’après le déjeuner, gris de poussière : ils avaient voyagé depuis Londres dans leur auto ; ils amenaient avec eux leur nièce Liban Beatoun, un valet, un chauffeur et deux femmes de chambre.

Moi qui redoutais tant ma première entrevue avec la sœur de mon mari !

C’est une femme délicieuse, aimable et sans façon.

Blonde, grande, forte, elle me dépasse de la tête et des épaules. Je la trouvai d’abord très imposante et m’approchai, rouge et intimidée, pour lui adresser mon compliment de bienvenue :

— Croyez, lady Handcock, que je suis très heureuse de…

Elle m’interrompit en me prenant par les épaules pour m’embrasser, puis, m’ayant regardée de très près — Sa Seigneurie est myope — elle s’écria :

— Mais Mark ! ce n’est qu’une enfant, une enfant mignonne et jolie, dont les yeux pétillent d’esprit, mais enfin une enfant !

« Je vais avoir l’air d’être sa grand’mère. D’abord, Phyllis, je vous défends de m’appeler lady Handcock, mon petit nom est Harriett et c’est celui que vous me donnerez puisque nous sommes sœurs : James, venez saluer cette jolie petite femme et ne la lorgnez pas trop, car je devine que Mark vous arracherait les yeux !

Sir James s’avança, salua, tendit la main, et je crus voir un automate dont les ressorts se déclenchent.

Mais son bon sourire me rendit confiance et je lui donnai une cordiale poignée de main.

Mark avait raison en me vantant la gentillesse et la beauté de Lilian Beatoun.

J’éprouvai, rien qu’en la regardant, une soudaine sympathie pour elle et je crois bien que ce fut réciproque.

Je la conduisis à sa chambre pour l’aider à s’installer. Cinq minutes après nous bavardions comme deux pies.

Voilà pour la famille.

Vers l’heure du dîner, arrivèrent deux grands chasseurs : M. Francis Garlyle et sir George Ashurst, petit jeune homme extrêmement blond, qui possède un nez aquilin, des joues souillées de chérubin, des yeux bleu clair au regard vague et des