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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/78

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PHYLLIS

qui êtes une femme adorée, qui possédez le meilleur es maris et qui, à dix-huit ans, avez trouvé le Prince charmant, vous ne pouvez même imaginer les peines qui…

Un gros soupir termina sa phrase.

L’énumération des bonheurs qui composaient ma félicité présente amena aussi un soupir sur mes lèvres.

Un silence puis, tout à coup :

— Phyllis, me dit mon amie, j’ai commis ce soir une horrible gaffe et j’ai mille excuses à vous faire…

— Ne parlons pas de cela, dis-je, gênée au souvenir de mon mensonge. J’avais réellement quelque chose de très pressé à faire avant le dîner et… j’ai pris le premier prétexte qui m’est venu à l’esprit pour m’échapper plus vite. C’est plutôt à moi de m’excuser…

— Votre mari est si bon qu’il vous excusera aussi, dit Lilian. Mais parlons de votre bal et des apprêts que nous allons faire. Il faudra décorer la grande salle…

Nous parlâmes longuement sur ce sujet, ensuite nous exprimâmes des opinions aussi malicieuses que piquantes sur tous les membres de notre petite société et, juste au moment où nous reprenions haleine pour taper sur un nouvel infortuné, la porte de la serre donnant sur le jardin s’ouvrit doucement, puis, un homme jeune, élégant, mince et élancé se dirigea droit vers nous.

La serre était dans une demi-obscurité, seuls les rayons d’une lune brillante passant au travers des vitrines y filtrait des teintes bleues.

En voyant paraître cet homme, nous nous étions levées. Dans mon saisissement, je pris la main de ma compagne, ne me sentant pas trop rassurée.

On y voyait assez pour distinguer les traits de l’inconnu.

Soudain, je sentis frémir la main qui serrait la mienne et Lilian murmura :

— Lord Chandos… lui !

Je m’avançai, rassérénée, au-devant du nouveau venu.

— Lord Chandos, je crois ? Nous ne vous attendions pas aujourd’hui, votre arrivée est une agréable surprise. Mon mari, M. Carrington — il me fit un grand salut — m’a dit qu’il vous avait écrit il y a quelques jours…

— J’ai reçu sa lettre, en effet, et, me trouvant libre, par hasard, j’ai sauté dans le premier train venu. J’ai dîné à Carston et suis arrivé jusqu’ici à pied, n’ayant pas trouvé de véhicule à cette heure