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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/79

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PHYLLIS

avancée. J’arrive ici comme un revenant, madame, et vous en fais mille excuses.

— Tous les amis de mon mari sont les bienvenus… Mais permettez-moi de vous présenter…

Je m’étais retournée au froufrou du tulle et de la soie. Lilian m’avait rejointe.

— Non, Phyllis, me dit-elle, puis, tendant la main :

« Comment allez-vous, lord Chandos ? J’espère que vous ne m’avez pas tout à fait oubliée ?

Pendant une seconde leurs yeux se rencontrèrent. Une seconde seulement… Lili souriait.

Était-ce la lueur incertaine des rayons de lune qui rendait son beau visage si pâle ? Ses yeux étincelaient, grands et sombres, mais sa voix qui résonnait gaîment dans le silence de la serre était aussi ferme qu’à l’ordinaire.

Le grand jeune homme recula un peu et s’inclina profondément.

— Je ne me doutais pas que j’aurais l’honneur de vous rencontrer ici, mademoiselle, dit-il avec une politesse étudiée.

Lili laissa échapper son rire harmonieux.

— Vraiment ? Alors nous sommes aussi étonnés l’un que l’autre. Je vous croyais encore à l’étranger, en France ou en Italie.

— J’en suis revenu la semaine dernière. Se tournant vers moi, lord Chandos demanda vivement :

— Carrington se porte bien, je l’espère ?

— Très bien, je vous remercie. Voulez-vous me suivre ? Nous allons aller à sa recherche.

Je le fis passer par le hall brillamment illuminé.

Par les portes ouvertes du grand salon, il aperçut mon mari qui, apparemment, me cherchait et vint à notre rencontre, tout épanoui.

— Ah ! Chandos, s’écria-t-il, que je suis heureux de vous voir ! Quel bon vent vous amène si vite ?

Il l’entraîna, tandis que je m’esquivais au bras de Lilian.

En entrant dans le petit salon, j’aperçus lady Blanche, presque allongée sur un fauteuil bas, qui parlait vivement à sir Francis, debout devant elle.

En me voyant, elle s’arrêta de parler et me dévisagea, tandis que j’approchais… Je sentis, en frôlant ses jupes étalées, les effluves d’un exquis parfum.

Ses doigts blancs, chargés de bagues, jouaient négligemment avec un grand éventail de plumes.

Chacun de ses mouvements était une essence… une grâce. Longuement, son regard me suivit, il me donnait une gêne indéfinissable et je fus heureuse d’arriver dans le coin de la jeunesse, pour m’en sentir délivrée.