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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/8

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PHYLLIS

Comme une folle, grimper aux arbres ou taquiner ton frère…

— Nous ne nous disputons pas, mère, nous nous aimons trop pour cela ! m’écriai-je dans un élan sincère.

— Oui, je sais que vous vous entendez tous deux comme larrons en foire pour jouer des tours pendables. Mais ces jeux de garçons seront finis pour toi, ma fille. Voici un cahier neuf, en te relisant chaque jour, tu réfléchiras sur ta conduite et j’espère qu’avec de la bonne volonté, tu arriveras à réformer ta nature rebelle à toute direction.

Me laissant sur ces mots, maman traversa la chambre avec une grande dignité. Cependant, arrivée à la porte, elle se retourna et me dit de son ton naturel :

— Ah ! j’oubliais de te dire : nous attendons aujourd’hui la visite de M. Carrington, notre propriétaire. Il est revenu de ses voyages et il s’est fait annoncer. Mon Dieu, je puis bien te dire ce secret, j’espère que tu sauras le garder…

— Oui, maman, fis-je, les yeux brillants de curiosité, même pour Billy.

— Cette première visite est fort importante, ma petite fille, reprit maman en baissant la voix, car elle décidera peut-être du sort de ta sœur. M. Carrington est encore un jeune homme, je veux dire qu’il n’est pas marié, et Dora est une fille délicieuse. Où pourrait-il en trouver une plus charmante et meilleure ?

— Oh ! certainement, dis-je, un peu froidement. L’orgueil de ma chère mère pour sa fille aînée est une chose bien excusable, étant donné qu’en comparaison avec sa fille cadette. Dora est une perfection.

— Si je te mets dans la confidence de notre espoir, fillette, dit encore maman, c’est parce que je désire qu’aujourd’hui tu te montres sous ton meilleur aspect. Enfin, tu tâcheras d’être convenable.

— Oui, maman. J’essaierai.

Sur cette vague promesse, maman sortit et me laissa seule avec mes réflexions.

Il est six heures du soir et me voici pour la première fois face à face avec mon cahier neuf et… comment dire aussi ?… avec moi-même. Il faut donc me rappeler et réfléchir. C’est une drôle de sensation que je n’ai jamais éprouvée. Je ne sais littéralement par où commencer.

Eh bien ! débrouillons-nous un peu.

Pour illustrer mon « Journal » je vais d’abord faire mon portrait. Quand je serai une vieille femme bran-