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RÉCITS DU LABRADOR

préparée pour la jaunisse. Il en fallait si peu !

Un frisson violent secoua tous mes viscères. Je me précipitai vers la porte, que je franchis d’un bond. Il était temps : le ragoût de moniac… m’abandonnait !

Je vous dois l’explication de cet accident et, quelque difficile qu’elle soit, je vais vous la donner.

Il existe sur la côte un parasite très répandu — trop répandu, — qui appartient au genre des insectes épizoïques. Les Romains qui le connaissaient déjà beaucoup lors de l’enlèvement des Sabines et qui le connaissent encore malgré l’unification de l’Italie, le désignaient sous le nom de pediculus. Larousse, Littré et autres entomologistes que vous pouvez consulter, prétendent qu’il y en a quatre espèces. Je ne les décrirai pas. Ce qu’il y a de certain, c’est le dégoût profond, invincible que soulève en moi cet insecte. Or, cet animal odieux possède, paraît-il, une vertu thérapeutique souveraine : confit dans la mélasse, il guérit de la jaunisse. Et Ludivine m’avait cru…… phtiriophage, tout comme un Hottentot.

J’ai pardonné, mais je ne puis plus voir et encore moins approcher un ragoût de moniac, et Ludivine n’a plus pour moi le même attrait !