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NOTES DE VOYAGE

plus fameux est Jean Le Minoux, de Pleumeur-Gautier. Je restreins cette observation au pays trécorrois. — De plus que les autres, Kérambrun est un komediancher (comédien), un acteur dans les drames populaires, que Ton représente encore, à certaines époques de Tannée, dans le Tréguier *. Or, c’est jouer là deux rôles ditTérenls ; un barde, comme on dît pour la littérature orale, ou bien, si Ton aime mieux, un poète, n’est pas toujours apte à devenir un comédien : et réciproquement. Kérambrun aura été un jongleur, dans toute la vieille acception du mot.

Mais les bardes ^ de noire temps ne descendent plus de leurs ancêtres du même nom ; et même le mot bardisnte, malgré sa terminaison moderne, est un vocable sans application. Les bardes bretons, pour n’être plus constitués en caste, sont toutefois une classe assez nombreuse encore. Les bardcsmendianls font toujours une catégorie : ils gagnent leur pain à chanter, fréquentent les foires, errent de ferme en ferme, ou sé trouvent par la grand’roulc sur le passage des diligences. Tous les mendiants ne sont pas des bardes ; on n’en flniraît plus avec leurs chansons ; car la mendicité, comme la folie, jouit d’une protection universelle en Rretagne. Si vous voulez recueillir quelque chose qui en vaille la peine, évitez ces pauvres gens, de même qu’on fuyait jadis les tailleurs. Ces bardes-là ne vous olTriront guère que leurs élucubrations à cnx-mémcs, imprimées sur des feuilles volantes : autant en emporte chaque saison nouvelle. Parfois il en reste la mélodie, sur laquelle scandera de nouvelles rimes ce barz baleerbro, chemin faisant, au sujet de quelque aventure qui vient de causer du bruit. EL souvent il invente Tair en même temps que les paroles.

Voilà les chanteurs de profession. Ils ont leur pain assuré, pour peu qu’ils retournent aux endroits connus ou aux mêmes fermes, à certaines époques, et qu’ils observent dans leurs chan-

1. Voy. plu8 loin, p, 50 et suiv., lez Mystères les Dt’ames.

2. Lire rtütroductioD dn Bariaz-Breiz^ et eurlouL Les cbapitrca coDcerniÎDt les Battes daoâ le livre de M. d’ArboU do JubatovîUe, Lts Cellts et iet langues celtiques.