Page:Quicherat - Mélanges d’archéologie et d’histoire, 1886.djvu/262

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fait om on des plus fors engiens ki soit por fais lever. « Ainsi fait-on un des plus forts engins qu’il y ait pour lever des fardeaux. »

Cette machine, en effet très puissante, était peu commode à cause de la lenteur de son action. Le principe s’en conserva jusqu’aux temps modernes. La figure 38 du Théatre mécanique de Jacques Besson, Forma novæ machinæ ad exonerandas quasvis naves, est une très légère modification de celle de l’album.

Trébuchet (fol. 30 recto). — On appelait ainsi une machine de guerre fort en usage au XIIe et au XIIIe siècle. On s’en servait pour lancer des quartiers de pierre ou des flèches de sièges. Celle de Villard de Honnecourt est appropriée au jet des flèches. Elle est représentée en plan ; l’élévation, ainsi que le marque la légende, se trouvait jadis sur un feuillet précédent qui manque aujourd’hui. Malgré ce que la figure a d’incomplet, on comprend que le jeu de la machine dépendait de deux énormes ressorts agissant dans son plan à droite et à gauche. Ces ressorts sont des pièces de bois flexibles, assemblées en potence. Il y a pour les tendre un câble que des poulies de renvoi et un tour conduisent à l’extrémité d’un fort barreau planté dans un treuil. L’auteur indique que, lorsque les ressorts étaient tendus, autrement dit lorsque le barreau était renversé en arrière, il fallait, pour l’y tenir en respect, une masse de douze cent quatre-vingt-seize pieds cubes de terre. Quant à l’affût et au jet de la flèche, ils étaient représentés sur la page aujourd’hui absente. Voici l’explication commune aux deux dessins :

Se vous volés faire le fort engieng con apiele trebucet prendres ci garde ; ves ent ci les soles, si com il siet sor tierre. Ves là devant les ij. Windas et le corde ploie a coi on ravale le verge. Veir le poes en cele autre pagene. Il i a grant fais al ravaler, car li contrepois est moult pezans ; car il i a une huge plainne de tierre, ki ij. Grans toizes a de lonc, et viiij. Piés de lé, et xij. Piés de parfont. Et al descosier de le fleke pensés et si vous en dones garde, car ille doit estre atenue à cel estancon la devant.

« Si vous voulez faire la forte machine qu’on appelle trébuchet, faites attention ici. Voici les soles qui procurent son assiette par terre. Voilà les deux guindales (ressorts) et la corde détendue dans laquelle on passe le barreau quand on le renverse. Vous en pouvez voir le jeu à l’autre page (celle qui manque). Il faut un grand effort pour le renverser vu la puissance du contrepoids qui est une manne pleine de terre, ayant deux grandes toises de long, neuf pieds de large et douze pieds de profond. Quant à la manière de décocher la flèche, jugez-