Page:Quicherat - Mélanges d’archéologie et d’histoire, 1886.djvu/263

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en par l’idée qu’elle doit être affûtée sur la traverse placée là devant la machine. »

Tout cela justifie très bien les expressions grandis, materialis, versilis machina, appliquées au trébuchet dans quelques-uns des exemples rapportés par Du Cange (v° Trebuchetum).

L’arc infaillible (fol. 22 v.). — L’arc de Villard de Honnecourt est une arbalète dont le fût est déterminé par une petite mitre tout à fait pareille à un éteignoir. Cet appendice était percé à son sommet d’abord pour diriger l’œil sur le but que l’on visait, et ensuite pour laisser passer le trait. Le dessin représente l’arc bandé et le trait posé sur le fût. A la queue du trait est attachée une longue ficelle nouée par l’autre bout sur le travers d’une cheville. Le trait étant chassé emportait avec lui la ficelle qui le suivait jusqu’à ce que la cheville vint barrer l’orifice de la mitre. Elle devait donc être plus longue que la distance à parcourir pour atteindre le but, puisque lorsqu’elle s’arrêtait, le trait s’arrêtait aussi. Une ligne droite tirée par delà la pointe de la mitre marque la tension de la ficelle lorsqu’elle sera emportée par le trait. Je ne connais pas de texte ancien qui atteste l’usage d’un instrument de cette sorte. Peut-être n’a-t-il jamais existé que dans l’imagination des mécaniciens du moyen âge, et il méritait d’y rester. Il est le digne pendant de celui qui montre le mouvement perpétuel. Légende :Par chu om une arc ki ne faut, « ainsi fait-on un arc qui ne manque jamais. »

Mécanisme pour faire tourner une statue sur elle-même dans un espace de temps donné (fol. 22 verso). — La légende explique la chose dans des termes qui ne conviennent qu’à un cas tout particulier :Par chu fait om un angle tenir son doit adès vers le solel. « Ainsi fait-on qu’un ange tienne son doigt toujours levé du côté du soleil. » Ceci serait une énigme si l’on ne se rappelait l’ancien usage de placer des statues d’ange sur le comble des grandes églises à l’endroit du rond-point. On ignore, il est vrai, qu’un mécanisme ait été jamais appliqué à ces statues pour leur faire accomplir du soir au matin une évolution en rapport avec le cours du soleil ; mais, outre que notre dessin prêterait difficilement à double entente, un monument détruit, il y a peu d’années, offrait encore des marques de ce vieil usage. Je veux parler de l’ange placé au chevet de la cathédrale de Chartres avant l’incendie de 1836. Il était de plomb et placé sur un pivot, ce qui avait accrédité l’opinion qu’il était là pour servir de girouette ; mais n’eût-il pas été bizarre de donner à un objet si pesant une pareille destination ?Il est bien plus naturel d’aller chercher dans le manuscrit de Saint-Germain l’explication du pivot de la statue de Chartres. Un pivot