Le Désert.
Quand un gardeur de chameaux vient à passer par
mon chemin, en chantant sa chanson pour que
son troupeau le suive, je me tais dans mon
sable. Depuis le matin jusqu’au soir, je
m’assieds à l’entrée de ma tente sur ma
grève ; j’écoute, je retiens mon souffle
tant que la caravane déborde à la porte
de Damas ou de Jérusalem. Ma voix est
le vent d’Arabie ; murailles qu’il va
secouer, portes demi-closes où il gémit,
tours dont il bat les créneaux, feuilles
du figuier qu’il dessèche, mitres et turbans
qu’il dénoue sur la tête des prêtres,
crinières des chevaux qu’il amoncelle,
comme une flamme de broussaille, écoutez
mon chant à votre tour.
La montagne adore son ombre ; le fleuve adore son limon ; la barque adore son rivage. Je n’ai ni ombre, ni limon à pétrir pour m’en
faire une amulette. Jéhovah est