s d’un détour
pour chercher dans son limon la ville qu’elle
abreuvait et qui lui faisait compagnie encore
hier, le rivage pleurait, le flot disait, en
bravant, à la mer, du plus loin qu’il la voyait :
mer, rends-moi, rends-moi, pour m’aider à me
sauver, ce qui te reste de mon empereur de
Sainte-Hélène. Au même endroit, un peuple
avait décapité un fils de roi d’ancienne race.
Ce tronc de géant qui gisait sans sépulture se
relevait toujours sur ses genoux, et se cherchait
une tête en gémissant. Mais à peine ceux qui
étaient alentour, et qui pleuraient, lui en
avaient-ils donné une autre, qu’il la laissait
choir à ses pieds, comme un poids qu’un homme
ne peut plus porter. Trois fois cela arriva,
trois fois la tête tomba, trois fois ce vieux
tronc redemanda un chef royal, de quoi
couronner sa plaie qui saignait sur ses
épaules. Cette vue était dure, et elle tira
de mes paupières des pleurs de lion.
Saint Marc.
N’as-tu trouvé rien que cela, en France l’honorée ?
Le Lion.
J’ai remué le sable de l’abîme ; j’ai balayé la
plage. La France n’a laissé ni or, ni vases,
ni bracelets de prix, ni beaux pendants
d’oreilles, ni mosaïques peintes, ni escaliers
de marbre. Je n’ai trouvé d’elle rien que cette
branche de chêne foulée dans les combats,
rien que ce bec d’aigle de bronze, rien que
cette poignée d’épée sans tache que je vous
rapporte pour la garder avec votre écusson.
Partout alentour, dans la bruyère du genre
humain, comme des levriers à travers monts,
quand le cor a retenti, et qu’ils suivent,
gueule béante, le sanglier sous la ramée,
l’un se tait et écoute, l’autre flaire une
broussaille, l’autre aboie, et la meute le
suit, après lui le chasseur courbé sur son
cheval, puis après le silence revient encore ;
ainsi une meute d’empires que le néant menait en