Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VIII, 1858.djvu/324

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les fleurs de grenade et les roses qui gisent sur la nappe.



Mon chemin est bien rude. Là-bas, sur mon sentier, qui voyage devant moi ? Les aigles noirs des Abruzzes, les vautours des Apennins avec leurs cols meurtris, les louves de Calabre avec leurs langues altérées.

Allez-vous-en de mon chemin, mes aigles noirs, mes vautours et mes louves, je n’ai plus rien à vous donner à boire. Mes ruisseaux n’ont plus de sang, mon épée n’est plus tranchante.

Cherchez un autre compagnon pour le voyage.

Qui est-ce qui vient après moi ? Les papes, les enfants que j’ai nourris dans mon église, mes jeunes vierges qui descendent de leurs toiles pour regarder où je vais. Allez-vous-en, mes papes ; je n’ai plus à vous donner ni mitres ni encensoirs. Mes petits enfants, retournez chacun sur vos pas ; je n’ai plus à vous donner ni oranges, ni figues, ni citrons. Mes belles vierges, retournez sur vos toiles bénies vous endormir le long de mes murailles : ma palette est épuisée ; je ne peux plus vous peindre chaque jour votre robe en indigo ni en vermillon de Foligno. Laissez-moi descendre toute seule au dernier fond de la vallée qui mène à Josaphat.



L’Ange, tourné du côté de l’orient.

Oh ! Que vous êtes lents dans la Chaldée, dans l’Arabie et dans l’orient ! Faut-il que j’aille mettre la selle à vos cavales, et que j’attache vos outres sur vos chameaux ?



Babylone, à l’Euphrate.

Mon fleuve, ne murmure pas si haut. C’est toi qui m’as réveillée en sursaut. Je rêvais de banquets et de fêtes dans ma vallée.



Le Fleuve.

Plût au ciel que ce fût moi qui aie parlé !



L’