e. Que votre paradis est déjà loin de moi !
La route est pavée de nuages. Oh ! Ne viendrez-vous
jamais ici ? Les étoiles qui s’épanouissent
sur leurs tiges y sont plus belles que dans
votre nouvelle cité. Ici croît la fleur, qui,
toute seule, embaume leur chemin. Sur sa feuille
est écrit : avenir. N’y viendrez-vous jamais
la cueillir après moi ? Quand je serai à la
cime du monde, je me ferai un ermitage pour
vous voir arriver. Ma chapelle sera teinte de la
couleur du soleil. Son toit sera d’azur ; et je
ferai résonner ma cloche, comme la foudre, pour
vous appeler de plus loin, si vous êtes égarés.
Comme une flèche d’une nef, quand l’église est
achevée, mon chant monte, s’aiguise, lèche les
cieux. Un délire éternel me flagelle le cœur.
Je veux voir ce qu’aucun oeil ne voit ; je veux
toucher ce qu’aucune main ne touche ; jusqu’au
mourir je veux aimer ce qui n’a point de nom.
Sous la voûte surbaissée des nues, tout me gêne,
tout m’embarrasse. Contre un passant, contre un
mot, un souvenir, moins qu’un soupir, ma pensée
se meurtrit à chaque pas. Par delà l’univers,
je vais cherchant un sentier pour respirer dans
mon abîme.
Sur ma route les soleils poudroient ; en courant,
ils vont prendre haleine dans la grande ombre
du lendemain qui fuit toujours. L’univers
haletant est un soupir de l’infini ; c’est
un instant qui va et vient et qui chancelle
entre deux éternités. Chaque empire remplit
un monde. Les cieux s’entassent ; leurs flots
débordent dans l’immensité comme le vin dans
sa coupe. Tout néant déshabité est repeuplé ;
et tout vide est comblé, hors un seul endroit,
là dans mon cœur, étroit, obscur, imperceptible,
à peine grand pour y cacher une larme. Ni
Dieu, ni fils de Dieu,
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