un grand aigle qui l’a touchée de son aile blanche ? N’est-ce pas plutôt le petit d’une hirondelle qui n’a pu rejoindre son nid, et qui s’est noyé dans la mer ?
Un autre Enfant.
Va, c’est la fleur du dattier que j’ai effeuillée
dans le ruisseau, et qui s’enfuit toute seule
de flots en flots, de rives en rives, bien
loin, là où il n’y a plus de branche pour la
bercer, comme un enfant qui dort dans son
berceau.
Un Vieillard.
Non, ce n’est pas le petit d’une hirondelle qui
s’est noyé dans la mer ; non ce n’est pas la
fleur du dattier qui blanchit comme l’écume.
N’entendez-vous pas une plainte qui sort de
chaque vague, un murmure qui s’achève dans
le lit de la mer ? La plainte des vagues ni le
murmure de la mer ne monterait pas plus haut,
si tout un monde venait de s’engloutir. Il me
semble entendre mille voix qui s’éteignent,
mille secrets des temps passés qui
s’accroupissent et s’endorment peu à peu,
comme des vieillards chenus sous les sables
et les coquillages de la mer.
Chœur de Jeunes Filles.
Oh ! Mon père ! Ne regardez plus si longtemps du
côté de la mer. Ce frémissement est celui des
feuilles de lotus qui se réjouissent de naître.
Ce murmure est celui des sources qui cherchent
leur chemin et le demandent aux bananiers et
aux fleurs qu’elles rencontrent : bananier au
vert ombrage, diamant qui reluis au soleil,
petit oiseau qui viens boire de mon eau,
dis-moi, quel chemin prendrai-je pour
descendre dans le fond de la vallée ? -source
fraîche d’hier, où je baigne le bout de mon
aile, où mes branches s’inclinent, où mon
cou d’azur reluit, viens, passe sous mon
ombre. épands-toi sur tes gradins, suis à
mesure mes pieds légers, tu trouveras dans le
fond de la vallée l’océan qui t’attend. Il
t’attend sur u