Page:Régnier - Œuvres complètes, éd. Viollet le Duc, 1853.djvu/87

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Il n’est à décider rien de si mal aisé,
Que sous un sainct habit le vice desguisé.
Par ainsi j’ay donc tort, et ne doy pas me plaindre,
Ne pouvant par mérite autrement la contraindre
A me faire du bien, ny de me départir
Autre chose à la fin, sinon qu’un repentir.
Mais quoy, qu’y feroit on, puis qu’on ne s’ose pendre ?
Encor faut-il avoir quelque chose où se prendre,
Qui flatte, en discourant, le mal que nous sentons.
Or laissant tout cecy, retourne à nos moutons[1],
Muse, et sans varier dy nous quelques sornettes
De tes enfans bastards, ces tiercelets de poëtes[2],
Qui par les carrefours vont leurs vers grimassans,
Qui par leurs actions font rire les passans,
Et quand la faim les poind, se prenant sur le vostre,
Comme les estourneaux ils s’affament l’un l’autre.
Cependant sans souliers, ceinture, ny cordon,
L’œil farouche et troublé, l’esprit à l’abandon,
Vous viennent accoster comme personnes yvres,

    de prêter à l’auteur un sens autre que celui qu’il a voulu donner à la phrase.

  1. C’est un proverbe pris de la farce de Patelin. Martial, liv. vi, 19, a dit de même : Jam dic, Postume, de tribus capellis. (Voyez Henri Etienne, en son Dial. du nouveau langage françois italianisé, édit. d’Anvers, 1579, page 137 ; et Pasquier, Recherches, liv. viii, chap. 59.) On pourroit, touchant ce proverbe, remonter jusqu’à celui-ci : Alia Menecles, alia porcellus loquitur, et voir l’explication qu’Erasme en donne. Rabelais a employé plus d’une fois ce proverbe, retourner à ses moutons, liv. i, chap. 1 et 2 ; liv. iii, chap. 33.
  2. Tiercelets de poëtes.] Parmi les oiseaux de fauconnerie, les femelles portent le nom de l’espèce, parce qu’elles surpassent les mâles en grandeur de corps, en courage et en force. Leurs mâles sont nommés tiercelets, parce qu’ils sont un tiers plus petits qu’elles. Tiercelet de faucon, d’autour, etc.
    Rabelais a dit : Tiercelet de Job. Pantagr. 3, 9.