Page:Régnier - Escales en Méditerranée.djvu/160

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blaient s’être donné rendez-vous dans ce labyrinthe et y formaient une sorte de mosaïque vivante. Il y avait des chameliers d’Arabie, drapés de laine fauve, le front ceint de cordes, des Syriens aux robes multicolores, des Persans à bonnets de fourrures, des Juifs de Palestine, des Afghans, des Kurdes, des Circassiens, des Mongols aux moustaches tombantes, tous, venus du désert, de la montagne, de la plaine, des rivages de la mer, des villes lointaines, se mêlaient en une mouvante bigarrure humaine, chacun dans le vêtement de son pays avec ses armes, ses parures, ses joyaux somptueux ou barbares. À côté des toiles et des draps luisaient les soies, les velours, les brocarts sur lesquels ruisselaient ors et broderies ou étincelait le feu des pierreries. En leur splendeur hautaine ou baroque, les chefs dominaient cette foule diverse et compacte dont leurs chevaux magnifiquement harnachés séparaient les rangs confus qui se prosternaient au passage des Khalifes, des Sultans, des Pachas, des Vizirs. En leurs robes d’apparat, coiffés de hauts turbans, l’aigrette au front, le cimeterre à la ceinture, ils s’avançaient à travers les fronts prosternés. Ils incarnaient tout le luxe féroce, tout le despotisme de la vieille Asie, tout le prestige de l’antique Orient, et qu’elle était donc peu de chose au-