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Page:Régnier - L'abbaye d'Évolayne, 1951.djvu/101

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l’abbaye d’évolayne

carrière soit belle et intéressante. Vous la compromettez par une trop longue absence. À Paris on est vite oublié. Si vos malades prennent l’habitude de s’adresser à d’autres chirurgiens, ce sera pour vous l’oisiveté, l’ennui.

Si justes que fussent ses arguments, il ne parut pas ébranlé.

— Bah ! soupira-t-il, de toutes façons….

— Michel, dit-elle tristement, vous avez pris votre profession en horreur, avouez-le.

— Elle me semble moins noble, moins nécessaire qu’autrefois. Tout homme, pour peu qu’il ait fait des études sérieuses, peut guérir ou soulager la chair souffrante, mais pour la mission essentielle qui consiste à sauver les âmes, il y a peu d’ouvriers.

Elle se rappela les paroles du père Athanase et interrogea, tremblante :

— Croyez-vous donc vous être trompé sur votre vocation ?

— Le sais-je ? dit-il en réfléchissant. J’aurais mieux fait sans doute de me diriger autrefois vers le professorat. Là on peut agir sur la jeunesse, former des chrétiens.

Rassurée par son incertitude, elle se fit enveloppante, persuasive :

— Vous avez, constata-t-elle, un grand besoin d’apostolat. Mais je pense qu’un immense champ d’action s’offre à vous dans la voie même que vous avez choisie et que vous dédaignez. Qu’y a-t-il de plus désarmé qu’un malade, de plus livré à celui qui le soigne ? Le médecin, pour peu qu’il le veuille, devient vite l’ami, le confident. Sa bonté ne rencontre qu’effusion et reconnais-