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Page:Régnier - L'abbaye d'Évolayne, 1951.djvu/136

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l’abbaye d’évolayne

pas connu cette peur ! Allez, le plus brave tremble devant l’exigence de Dieu.

Un jour enfin, paternel et paisible, il résuma la situation :

— Voyons, je comprends mal l’état où je vous vois. Vous vous prétendez attirée vers le cloître, vous nous avez suppliés d’examiner votre vocation. Elle nous a paru sincère, mais elle est trop exceptionnelle pour que nous n’agissions pas avec la plus grande prudence. Nous vous proposons une épreuve nouvelle qui n’engage aucunement l’avenir et doit seulement vous permettre de vous mieux comprendre. En l’acceptant, vous n’accomplissez rien de définitif. À quoi bon trembler et vous tourmenter à l’avance ? Dans un an, si vous avez changé d’avis vous pourrez reprendre, sans aucune difficulté, votre vie ancienne.

Mais Adélaïde sentait qu’après un an de séparation Michel, déjà détaché d’elle, ne lui reviendrait que par devoir, si elle l’exigeait absolument et qu’en consentant à le quitter elle créait entre eux de l’irréparable. C’est pourquoi elle hésitait si fort. Le moine voyant sa perplexité reprit avec indulgence :

— D’ailleurs le conseil que nous vous donnons n’est point un ordre. Vous êtes libre de ne pas le suivre. Je le répète vous êtes libre et nul ne vous contraint. Est-ce Michel que vous craignez ? Je réponds de lui et il rentrera demain avec vous à Paris si vous le souhaitez, sans vous faire le moindre reproche. Les choses sont beaucoup plus simples que vous ne le croyez. Dites seulement « je ne veux pas » et il ne sera plus question de ce qui s’est passé ici.