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Page:Régnier - L'abbaye d'Évolayne, 1951.djvu/156

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l’abbaye d’évolayne

dain comblait l’âme que la présence divine laissait inassouvie. Elle aboutissait à une certitude absolue, indiscutable.

— C’était lui que j’aimais ! Je n’ai jamais eu d’autre Dieu.

La révélation foudroyante fut suivie d’une sorte de paix lourde, abominable. Elle avait demandé la lumière et l’obtenait : lumière lugubre. Elle voyait clair dans son cœur déshérité. Elle ne se débattait pas devant l’évidence. À genoux parmi ses compagnes, les mains jointes dans l’attitude de la prière, elle considérait en silence le désastre irréparable de sa vie.

Quelqu’un lui toucha l’épaule. La messe était finie, ainsi que les derniers chants et l’action de grâces. Machinalement, elle sortit avec les autres religieuses de la chapelle. La mère Hermengarde lui dit :

— Allez, ma fille, le père Stéphane vous attend au parloir.

Le père Stéphane ! C’était le nom que Michel porterait à présent jusqu’à sa mort et qui faisait de lui l’étranger sur lequel elle n’avait plus aucun droit. Leur entretien était devenu inutile. Tant qu’elle avait douté, elle s’était aisément persuadée que son mari pourrait encore l’affermir en lui démontrant une vérité imparfaitement comprise. Maintenant elle savait que son mal était incurable et qu’il n’y remédierait pas. Il fallait faire un dernier aveu. Et qu’importait qu’il la condamnât ou s’accusât lui-même. Tous deux souffriraient désormais l’un par l’autre, sans fin.

De son pas léger de religieuse, elle glissait à