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Page:Régnier - L'abbaye d'Évolayne, 1951.djvu/175

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l’abbaye d’évolayne

pour les Vosges où elle demeura tout l’automne, partageant son temps entre la promenade et l’étude.

Pascal, le premier auteur dont elle voulut s’aider, lui offrit sa théorie du jeu et du pari. Le plus sûr est de croire en Dieu. Parions qu’il existe. Si nous perdons, nous ne perdons rien. Si nous n’avons adoré qu’une image vaine, une illusion, nous ne le saurons même pas. Nous n’aurons sacrifié à notre foi qu’une vie dérisoire et sans lendemain pour sombrer quelque jour sans être détrompés dans l’ignorance. Au contraire, si le Dieu que nous avons rêvé nous attend par delà la mort, nous gagnons la récompense éternelle et l’éternel amour.

Ce raisonnement, bien que fort logique, ne plut pas à Adélaïde. Adopter une religion comme on prend une assurance contre le vol ou l’incendie, apporter à ses intérêts spirituels la même prudence qu’à ses intérêts matériels lui semblait assez mesquin. Si rien dans le monde ni dans son âme ne lui révélait la présence d’un créateur, le plus noble était de lui refuser sa foi et d’encourir le risque d’être rejetée par lui au dernier jour, car un Dieu puissant et vivant ne pouvait accorder nulle valeur aux hommages craintifs rendus à tout hasard à quelque probabilité. Elle ne comprit pas que ce pari, assez médiocre, ne représentait qu’un premier effort pour inviter les débutants à commencer une recherche entre toutes importante. Elle n’alla pas plus loin dans les Pensées.

Pour Descartes qu’elle ouvrit ensuite, l’idée de Dieu impliquait l’existence de Dieu comme l’effet suppose la cause, car cette idée serait inexplicable, si l’on n’admettait pas l’origine de son objet.