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Page:Régnier - L'abbaye d'Évolayne, 1951.djvu/185

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IV

Un an s’était écoulé depuis sa sortie du cloître, année stérile. Ni par la pensée, ni par l’action, elle n’avait pu s’élever vers Dieu. Elle ne pratiquait plus que juste autant qu’il le fallait pour ne pas être en dehors de cette Église dont Michel faisait partie. L’idée religieuse l’obsédait sans jamais l’apaiser, et, selon que la douleur pesait plus ou moins sur elle, lui semblait plausible ou inconcevable.

À mesure qu’elle perdait l’espoir d’arriver à une solution, elle renonçait à l’effort sur soi-même et, au lieu de résister à sa passion, lui cédait. Où qu’elle fut, Michel était toujours à ses côtés et leur entretien se prolongeait jusqu’au moment où la réalité dissipant les mirages d’une présence imaginaire la frappait comme un coup de couteau. Cette pensée ; « Vivant mais perdu à jamais pour moi ! » lui donnait le vertige. Déjà elle n’acceptait plus l’idée d’une séparation définitive, d’un total oubli.

C’était dur ce silence autour d’elle, cette absence de tout échange ! Elle se surprenait parfois à parler tout haut dans les bois ou la nuit, pour éprouver si le sceau qui pesait sur sa bouche n’était pas celui de la mort. À vrai dire, sa volonté seule la frustrait de toute société humaine. Dans les