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Page:Régnier - L'abbaye d'Évolayne, 1951.djvu/189

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l’abbaye d’évolayne

houette chère, les traits aimés. Un cri lui échappa :

— Michel !

Puis un autre cri, plus fort :

— Êtes-vous mort ou vivant ?

La voix, brusquement tremblante, reprit :

— N’ayez pas peur, madame Adrian. Je suis Bernard Vallin, de votre hôtel.

Par hasard, elle avait entendu nommer ce jeune homme qui, depuis quelques jours, prenait ses repas à une table près de la sienne. Il ressemblait un peu à Michel : même stature, même coupe de visage. Trompée par la fatigue et l’émotion, elle venait de le prendre pour un autre. Lui cependant crut que, malade ou blessée, elle délirait. Il s’était agenouillé à ses côtés, examinait à la lueur de la lampe son visage extrêmement pâle, mais dont le regard était normal. Il toucha ses vêtements humides, enleva son écharpe trempée et l’enveloppa d’une pèlerine qu’il avait sur le bras. Puis il porta à ses lèvres une petite gourde dont il s’était muni. Elle but une gorgée de cognac dont la force la ranima. Elle murmura un faible merci. Alors il interrogea, anxieux.

— Souffrez-vous, madame ? Pourrez-vous marcher jusqu’à l’hôtel ? Ce n’est pas très loin, cinq cents mètres à peine. Désirez-vous que j’aille chercher du secours ?

Elle le rassura. Elle n’était pas malade, seulement un peu engourdie par l’immobilité.

Dès qu’elle eut fait quelques pas à son bras elle se sentit mieux. Il la guidait avec sollicitude, lui désignant les moindres obstacles : racines d’arbres, branches cassées, pierres. Ils rejoignirent enfin la route. Alors seulement elle songea à la déception